Dans De la guerre, publié post-mortem en 1837, le général prussien Carl von Clausewitz (1780-1831) écrivait que « la guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens ». Manière de dire qu'il n'y a pas de rupture profonde entre les deux conditions et que si la politique est une pratique « civilisée », alors la guerre, qui la continue, l'est tout autant. En forçant donc le trait, on affirmera que peu importent les figures et les finalités spécifiques de chaque guerre – leur violence, leur cruauté ou leurs mobiles – l'essentiel gît dans le fait que la politique – une pratique de temps de paix – se poursuit et qu'elle est nécessairement appelée à évoluer et à prendre encore de nouvelles formes.
La guerre serait donc éthiquement neutre et son horreur n'en serait que la regrettable surface. Un tel postulat est-il acceptable ou faut-il reprendre à nouveaux frais l'approche axiologique de la guerre ?
Avec la guerre, il y a toujours potentiellement un passage à la limite – Thucydide (vers 460-vers 395 av. J.-C.) nous l'enseigne déjà quand, dans la Guerre du Péloponnèse, il évoque le massacre parfaitement gratuit des Méliens par les Athéniens. Manière de dire que la guerre n'est pas seulement tactique ou stratégie, elle est fondamentalement une affaire morale. Mais en quel sens ? Non au sens où elle serait « juste » : tout belligérant, offensif ou défensif, revendique la justice, l'adversaire étant toujours l'incarnation d'un mal ou d'une menace qu'il faut éliminer. « Affaire morale », cela signifie plutôt que le phénomène global de la guerre, des combats et de leurs finalités multiples, engagent des prises de décision, des positionnements éthiques, et non simplement des calculs militaires. La position théorique correspondant à ce postulat de la perméabilité axiologique de la guerre est celle du réalisme moral soutenu, notamment, par le philosophe américain Michael Walzer (né en 1935). Cet horizon théorique tient en une proposition simple : la guerre n'est pas un simple phénomène technico-militaire enveloppé de politique, mais elle est un système de choix engageant des intentions, des volontés et par conséquent des libertés.
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